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  • ARGUETTE

    Voici le 3eme épisode avec les deux commentaires parus sur le Café des Vallées.

     

    "Arguette" - 3e épisode : Le long voyage à travers la montagne

    - Cette femme me rendra fou, dit Grand-Père. Voilà que moi aussi, je crois entendre cette maudite vache ! »

    Il dut cependant se rendre à l'évidence. Sa femme n'était plus là et c'était des meuglements qu'il entendait. II courut à la fenêtre et, au milieu de la cour, il vit Bonne-Maman en chemise, pieds nus et Arguette se faisant des tendresses sous la froide lune de septembre.

    Ce fut un véritable prodige. Tout le village défila à la maison pour voir cette merveille : une vache qui avait fait plus de quatre-vingts kilomètres dans la montagne, toute seule, pour rejoindre la maison où elle était née ! Il y eut bien quelques vieilles grincheuses pour murmurer qu'il y avait de la sorcellerie là-dedans... Mais, à la maison, personne n'y prêtait attention.

    Cependant, le curé du village, « Moussen Daniel »1, prit mon grand-père à part et lui dit :

    « Julian, cette vache n'est plus à toi ! Il faut la rendre !

    - Je sais bien, Moussen, mais voyez ! Nous sommes en octobre... le port de Viella2 n'est pas encore fermé mais cela ne saurait tarder. Je risque d'être bloqué là-bas et que va dire Antonia ? Je vais écrire au propriétaire. Peut-être acceptera-t-il de me la recéder. S'il refuse, je la lui rendrai au printemps.

    - Julian, Julian ! Ce sont de mauvaises excuses. Tu dois partir tout de suite et tant qu'iI fait encore beau ; c'est une affaire de huit jours. Demain, tu partiras. »

    L'ascendant du Moussen était tel que personne ne songea à discuter. Et Bon-Papa se prépara pour ce long voyage.

    A quatre heures du matin, croyant la maison endormie, tenant Arguette en laisse, Il franchissait le pont des "Abos"3, lorsqu'il vit sa femme lui tendre à bout de bras, la chaîne d'or et la montre, souvenir précieux de son père qu'elle n'avait pas connu, en lui disant :

    « Peut être, que Maître Grané, le notaire de Bossòst voudra nous donner assez d'argent contre ça, pour racheter Arguette ? »

    Bien qu'il fut plus ému qu'il ne voulut, Bon-Papa eut un petit mouvement de jalousie. Cette montre que tout le monde vénérait comme une relique !... Dieu du ciel, qu'est-ce qu'il fallait entendre !... Et puis quand nous passerons à Bossòst, Maître Grané sera dans son lit et, ce n'est pas moi qui irai le réveiller.

    Et c'est en maugréant qu'il reprit la route.

    Mais allez donc faire quatre-vingts kilomètres à travers la montagne, par des chemins scabreux, avec une vache rétive qui faisait deux pas en avant et trois en arrière dès qu'on n'y prenait garde. Bon-Papa était exténué quand il arriva au pied du Col. A ce moment-là, le tunnel de Viella n'existait pas. II fallait prendre un chemin qui grimpait dans la montagne et traverser un col qu'on appelait le "Port Vieil ".

    De chaque côté du col, se trouvaient et se trouvent encore, deux immenses bâtisses solidement construites en pierres grises du pays que l'on appelait « Hôpital de Viella ». Les municipalités avoisinantes payaient, à longueur d'année, des gens qui devaient assurer le vivre et le couvert aux voyageurs en difficulté, et leur porter secours en cas d'accident, car il arrivait que certains, trop téméraires, se perdaient dans la neige et le brouillard et, souvent, à la fonte des neiges, on retrouvait leurs cadavres au fond des "Clots"4.

    Le premier passage se fit sans encombre. Arguette semblait s'être fait une raison. Le temps était au beau fixe. Vilaller n'était plus très loin. Après Senet, ils étaient presque arrivés. Ce fut donc au soir du troisième jour qu'ils atteignirent le but de leur voyage.

    En les voyant, le propriétaire leva les bras au ciel, invectivant tous les saints du Paradis, pour avoir osé lui renvoyer une bête pareille.

    « Je la croyais morte dans la montagne,"espallée"5 au fond d'un ravin, mangée par les bêtes sauvages, c'est tout ce qu'elle mérite. »

    Mon grand-père s'attendait à quelques reproches, mais pas à un pareil accueil !

    « Que vous a-t-elle donc fait ?

    - Ce qu'elle m'a fait ! Je l'avais mise au "couraou"6 avec les autres quand elle a commencé à chercher à s'enfuir et, quand le taureau s'est approché d'elle, elle est devenue folle, elle a cassé les barrières, toutes les bêtes se sont sauvées dans la campagne. Nous avons mis plus de deux jours pour les rassembler. Ah ! vraiment, je ne veux plus de votre maudite bête !...

    - Justement, dit Bon-Papa, si vous voulez me la revendre ?

    - Vous la revendre ? Je vous l'avais prise pour rien, je vous la redonne pour rien, mais débarrassez-moi d'elle. Je ne veux plus la voir.

    - C'est entendu, nous repartons aussitôt. »

    Mais, en ce temps-là, l'hospitalité était grande, et on ne le laissa repartir, le lendemain matin qu'après lui avoir servi un bon déjeuner d'œufs et de lard frit.

    Un bon coup de vin au "pourou"7 et en route. Cette fois, il n'eut plus besoin de tirer sur la longe pour qu'Arguette le suive. Il lui en fit une tresse autour des cornes. Il mit sous son bras un gros fromage qu'on lui tendait, prit un bâton ferré et dit simplement :

    « Arguetto ! A caso !8 »

    ___________

    Notes :
    1. "Moussen"
    : sans doute de moussegne, Monseigneur, titre honorifique pour montrer l'importance du personnage (cf. plus loin : "L'ascendant du Moussen était tel que personne ne songea à discuter".

    2. "Port"
    : Passage. Port de Viella = Port Vielh : Vieux passage.

    3. "Abos"
    : aboussa, du latin albò, asphodèles. La plante pousse en milieu humide, en bord de ruisseaux ou près des ponts en effet. Dans les périodes de disette les tubercules d'asphodèles, eths aoubos, étaient donnés aux lapins et aux cochons qui en sont friands.

    4. "Clots"
    : (clòts) creux, trous, voire ravines où s'accumule la neige par exemple.

    5. "espallée"
    : écorchée.
    Du latin spoliare (dépouiller); espeiller : ôter la peau, dépecerdespoillier (XIIe).
    6. "couraou"
    : courrau : bercail, enclos où sont rassemblées les bêtes, corral. Peut-être du latin vulgaire : cirque pour les courses de char. Le courrau du Crabères, comme d'autres, est toujours en activité.

    7. "pourrou"
    . Porron = goulot, burette à vin. Un coup de vin "au pourrou" ou à la régalade.

    8. "a caso"
    : à la maison.

    ___________



    Commentaires

    1. Le Samedi 7 août 2010, 13:19 par Anne-Marie

    Notre Arguette à nous, elle s'appelait Bichette et bien qu'elle n'ait traversé que la longueur d'un pré, ce fut une grande émotion.
    J'avais 9 ans quand nous avons dû quitter définitivement la campagne et la ferme. Les récoltes avaient été mauvaises, les vaches furent vendues et le chien ... non, ça je ne peux pas le dire !
    Nous sommes allés grossir les quartiers "modernes" de la ville. Mais nous repartions certains dimanches rendre visite à nos anciens voisins. Un jour, sur le chemin, ma mère poussa des cris dans la voiture. Dans un pré, sur le bord de la petite route, Bichette paissait tranquillement avec ses nouvelles compagnes.
    Ma mère sauta hors de la 203 et se mit à appeler : "Bichette ! Bichette !". La vache n'en attendit pas davantage. Elle traversa le pré en courant et vint se faire caresser en tirant la tête par-dessus la clôture électrique. Et nous sommes sûrs d'avoir vu des larmes dans ses yeux.

    2. Le Lundi 9 août 2010, 18:28 par Elodie

    Nous attendons vivement le feuilleton du samedi. Le jour dit, je lis l'aventure d'Arguette à voix haute, pour toute la famille.
    Serait-il possible de grossir les notes en bas de pages ?

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  • DEVIATION DE SAINT-BEAT

     

     

    DEVIATION DE SAINT-BEAT

     

     

    L’Association des riverains et voisins de la RN 125 a profité de l’été pour prendre ses marques et  rencontrer      les     responsables de la DDE.

    Suite à deTour de France 010.jpg nombreuses rencontres, entre monsieur Daniel EGRE et monsieur le Sous-préfet de Saint-Gaudens, un responsable de Toulouse nous a reçu dans les anciens bureaux d’OMG. Les discussions ont été courtoises mais nous ont pas appris grand-chose sur le  commencement des travaux. Lors de ces discussions a été mentionné la création d’une maquette virtuelle. Malheureusement nous n’avons pu profiter de cette innovation, les ordinateurs familiaux n’étant pas assez puissants pour nous la montrer. Toutefois dés que cette maquette sera opérationnelle nous devrions la voir Salle des Fêtes de Saint-Béat en présence des élus. Donc un peu de patience pour ce rendez-vous.

    Contrairement à ce qu’il a été annoncé dans la presse les travaux n’ont pas commencé au mois de Juillet. Nous pouvons toutefois vous annoncer qu’ils commenceront au mois de septembre. Les marchés sont passés. Il s’agit du rond point    d Eup, au lieu dit Portingau et des travaux relatifs à l’entrée nord du tunnel. Ceux-ci seront malgré tout importants puisqu’ils comporteront outre le rond-point, les bacs de décantation des eaux, les murs de soutènements, la protection contre les chutes de pierres, la démolition des maisons Macias, Filoche,  Auban et un hangar appartenant à l’usine Dabos. Souhaitons que ces travaux seront suivis du percement du tunnel.

    Côté Lez, disons sortie sud du tunnel, tous les travaux programmés ne sont pas arrêtés, mais nous savons déjà que les habitants de Lez devront rejoindre la côte de Boutx pour sortir du village et par exemple se rendre à Saint-Béat. Mais attendons d’en savoir plus pour donner des informations concrètes aux habitants d’Argut et du Plan.

    L’association n’a pas chômé. Elle a entre autre accompagné monsieur Cazassus, le responsable du projet, et sa secrétaire, Sylvie Poirot, répertorier les genévriers thurifères du Mount.

    Le docteur Sabatier a quitté sa maison de Lez pour habiter dans sa nouvelle habitation qu’il a fait construire sur la commune d’Eup. Son ancienne demeure ne devrait pas servir de bureaux à la DDE. Pour le moment elle ne doit pas être démolie. Madame  Sylvie Poirot, controleur principal des travaux, y habite.

    Nous comptons faire une réunion publique sous peu pour vous entretenir de ce projet de déviation qui va bouleverser la vie des Saint-Béatais.

    Toutefois nous savons que le projet débute au ruisseau d’Arguillet. Rien n’est prévu pour améliorer la vie des entreprises et habitants de la plaine de Chaum et du Campas. Nous devons porter ce problème devant les responsables de la DDE. Plus nous serons nombreux à le faire plus nous serons crédibles.

  • ARGUETTE

    Voici le deuxiéme épisode de l'histoire d'Arguette.

     

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    "Arguette" - 2e épisode : Les vaches maigres

    Cette année-là, l'herbe poussa mal. Les soins de Bon-Papa pour creuser les "pachères"1 et irriguer les prés furent vains et, comble d'infortune, au moment de la fenaison il plut sans arrêt pendant plusieurs jours et on ne put engranger que la moitié du fourrage prévu pour les dix-huit vaches et cinquante moutons qui avaient passé l'été sur les gras pâturages du « plan du Crabère »2.

    Bon-Papa, la mort dans l'âme, dut se résoudre à vendre une partie du cheptel. Il fit donc le tri, choisit les vaches les plus âgées et produisant le moins de lait et il décida d'aller les vendre à la foire de la Saint-Michel, qui se tenait chaque année à Viella, la capitale du Val d'Aran, située à une vingtaine de kilomètres de Pontaut.

    Bonne-Maman, le cœur lourd, ne disait rien ; Bon-Papa non plus. Personne n'osait aborder la question mais tout le monde pensait à Arguette : mais qui donc voudrait d'une bête si malingre qu'on ne pouvait atteler à la charrue et qui, visiblement, n'aurait jamais de veau, donc du lait ?!

    Aidé par mon oncle Jean et un valet, Bon-Papa se mit en route la veille du jour de foire. Il fallait bien toute une nuit pour arriver dans de bonnes conditions et présenter des bêtes reposées, faisant bonne impression aux maquignons qui s'entendaient à merveille lorsqu'il fallait déprécier la marchandise.

    Arguette, voyant partir quelques unes des braves laitières qui lui avait prêté leur pis généreux, étourdiment, sans penser à rien, se coula au milieu du troupeau. Bonne-Maman l'appela, elle fit semblant de ne pas entendre, l'ingrate, et Bon-Papa n'insista pas pour la faire rester.

    «Ne t'en fais pas, je la ramènerai ! Personne n'en voudra ! cria-t-iI en guise d'adieu.

    - Personne n'en voudra, personne n'en voudra... c'est ce que se répétait Grand-Mère en vacant à ses occupations.

    - Personne n'en voudra... se répétaient Pilar et Marie, les petites dernières.

    - Personne n'en voudra, personne n'en voudra... ce fut le refrain que l'on se répétait sans cesse pour « s'embaumer le cœur »3.

    Mais voilà ! Trois jours après, quand les hommes revinrent, Arguette ne les accompagnait pas ! Un peu honteux, car il aimait bien sa femme et comprenait son chagrin, Bon-Papa expliqua qu'il avait vendu son troupeau tout en bloc à un propriétaire de Vilaller qui avait exigé la totalité, donc Arguette.

    « Cela fera une bête de moins à nourrir. Mais surtout ne vous en faites pas ; elle est partie toute contente au milieu des autres ! »

    Courageusement, Bonne-Maman, le premier chagrin passé, ne fit aucun reproche. Mais quand on regardait son visage, on comprenait que, dans sa tête et dans son cœur, le nom d'Arguette revenait sans cesse, ce qui énervait Bon-Papa et lui donnait mauvaise conscience.

    Or, voilà que quelques jours plus tard, au milieu de la nuit, sa femme, qui semblait dormir à ses côtés, se dressa toute droite en criant :

    « Arguette !!!